Mercredi 9 novembre, dans le cadre de la Chaire Behaviour, l’ENIM a eu l’immense honneur d’accueillir Fabrice d’Ornano, Directeur EHS France du groupe Saint-Gobain, et ancien commandant de sous-marins nucléaires au sein de la Marine Nationale.

Il a ainsi pu donner une conférence sur le rôle du collectif au sein des systèmes complexes, basée sur son expérience professionnelle du commandement.

Officier ingénieur issu de l’école navale, sa carrière de 30 ans dans la Marine Nationale a été jalonnée par 4 commandements :

  • Un bâtiment de surface en Afrique (Djibouti)
  • 2 sous-marins nucléaires, donc un sous-marin nucléaire d’attaque et un sous-marin nucléaire lanceur d’engins
  • L’escadrille des sous-marins nucléaires lanceurs d’engin à Brest

Il a également été responsable de la formation des équipages et de la sélection des commandants de sous-marins nucléaires. Ce cursus lui a permis de consolider son aptitude à favoriser le collectif pour optimiser la performance, malgré la pression et les enjeux tout en tenant compte du risque et des délais lors des prises de décision.

Pour Fabrice d’Ornano, expert sûreté et gestion de crise ayant passé 25 ans au sein de la Marine Nationale, la principale valeur réside dans le travail collectif. Ce dernier permet l’assimilation d’informations toujours plus nombreuses et complexes, mais repose aussi sur l’existence d’un leader pour intégrer l’information digérée et prendre les bonnes décisions dans un temps imparti.

L’esprit d’équipe, ainsi que l’importance de l’intelligence collective, fût grandement détaillée lors de sa conférence. La promiscuité ainsi que les courts délais de prise de décision ainsi que leurs conséquences éventuelles dans un milieu tel qu’un sous-marin de haute technologie empêche un management basé sur une approche taylorienne ou un cloisonnement des tâches trop marqué. L’objectif du management dans ce type de situation est de stimuler l’intelligence collective. Au vu des flux de données importants qui accroissent la complexité de ce milieu, la nécessité de prendre du recul dans le traitement et l’analyse de données est primordiale, et seul le collectif peut répondre à cet enjeu.

Son analyse démontre un seuil de sensibilité humaine très performant face aux données traitées et analysées, bien plus que le seuil de sensibilité des données fournies par la technologie, aussi puissante soit-elle. Cela restreint la capacité individuelle à hiérarchiser les informations et prioriser les tâches lors de prises de décisions rapides reposant sur de grands enjeux. Le manager moderne doit donc s’adapter, et prendre le rôle de stimulateur d’intelligence collective pour démultiplier cette capacité de traitement et d’analyse des données.

L’enjeu du manager est donc de stimuler l’intelligence collective dans des systèmes portant entièrement sur une approche hiérarchique des choses, le lien de subordination étant contre-productif dans certaines situations. La contribution collective et individuelle a donc pour objectif d’imaginer ensemble une solution plutôt que de hiérarchiser toute tâche suite à une décision prise par un décisionnaire unique.

L’approche initiée par Fabrice d’Ornano, appelée « approche par nucléons », consiste à assigner un rôle à chaque membre de l’équipe chargée de la prise de décision. Le manager dispose ainsi d’un adjoint, servant de régulateur et de transmetteur d’information. Ce binôme doit être accompagné d’un « gardien des dogmes », qui veille au respect des règles et procédures, mais également d’un « rebelle », qui pousse à argumenter les propositions de solutions, et pousser les autres dans leur retranchement pour optimiser la remise en question. « L’optimiste » maintient la confiance en certaines décisions, tandis que « l’artiste », éternel créatif, imagine des solutions sortant des sentiers battus. Enfin, « le benchmarkeur », dispose des références en la matière et est apte à conseiller les membres de l’écosystème du manager en toutes circonstances.

Le collectif est ainsi créé en associant les forces contraires pour augmenter la performance par la complémentarité des compétences et des personnalités. Le leader doit par conséquent créer son écosystème humain et accepter que la stabilité est aujourd’hui une caractéristique précaire dans des systèmes complexes nécessitant des prises de décisions rapides. La stabilité disposant d’une variation rapide, elle se prépare lorsque les équipes ne sont pas dans des situations d’urgence. Le leader doit donc s’adapter en cassant les codes des approches hiérarchiques conventionnelles pour accentuer la capacité collective. Il pourra ainsi faire face aux imprévus et agir rapidement de manière adaptative dans les situations de prises de décision.

En 2017, Fabrice d’Ornano rejoint le groupe Saint-Gobain pour prendre la direction du projet de construction du nouveau siège situé à la Défense.

Depuis Octobre 2021, il occupe les fonctions de Directeur Environnement Hygiène Sécurité France du groupe Saint-Gobain.